Le nouveau management public qui s'est développé dans les établissements d'enseignement supérieur au cours des dernières années instaure une conduite de l'action par les résultats et l'évaluation de la performance. Cette évaluation porte plus particulièrement sur les produits éducatifs (Rege Colet, 2003), c'est-à-dire les enseignements et les formations. Elle est au cœur de l'espace européen de l'enseignement supérieur initié par la déclaration de Bologne en 1999. Des formations dites de qualité contribueraient à attirer les étudiants étrangers en permettant aux universités de figurer en bonne place dans les classements internationaux. Par ailleurs, le développement de l'enseignement supérieur est conçu comme l'outil principal pour surmonter la crise économique. Or, soutenir financièrement l'enseignement supérieur dans une période de crise économique implique d'être exigeant sur la qualité des formations afin de s'assurer que l'argent public est correctement dépensé, ainsi que le rappelle le texte final de la conférence de Bucarest en 2012.
Evaluation des formations et des enseignements sont intimement liées. Des critères utilisés pour évaluer les formations conduisent en effet à interroger la qualité des enseignements reçus, notamment l'efficacité interne (adéquation entre les résultats obtenus par les étudiants et les objectifs pédagogiques posés au départ) et l'équité (taux d'échec différencié dans la formation en fonction de divers critères tels que le cursus antérieur). Dans tout le processus de pilotage de l'action par l'évaluation de la performance, l'évaluation de la qualité des enseignements joue probablement un rôle clé. Romainville (2009) définit un enseignement de qualité à partir de deux critères : un enseignement adapté aux finalités qui permet la maîtrise par les étudiants des acquis attendus ; un enseignement ouvert à la diversité des publics prenant en compte les acquis préalables et les besoins différenciés des étudiants. Un enseignement de qualité doit permettre de soutenir la réussite des étudiants en améliorant la qualité des apprentissages.
Mais qu'entend-on par qualité des apprentissages ? Quelles sont les variables susceptibles d'influencer celle-ci ? Ce symposium franco-britannique abordera ces deux questions. Elles sont évidemment cruciales si l'on veut éclairer en retour ce que pourrait être un enseignement de qualité et elles ne sont pas spécifiques à l'aire francophone, d'où l'intérêt de confronter les réflexions de chercheur-e-s français et britanniques. Peu de travaux scientifiques ont abordé ce champ cependant, en dehors de ceux de Biggs (Biggs, 2001 ; Biggs & Collis, 1982) qui a proposé plusieurs critères de la qualité ainsi qu'une taxonomie (SOLO) des apprentissages effectués par les étudiants en fonction de leur complexité. Les communications présentées ont pour point commun d'explorer les liens possibles entre les dispositifs pédagogiques utilisés et la qualité des apprentissages.
La première communication est basée sur une enquête qualitative menée dans une université anglaise. L'enquête a pris comme terrain de recherche un cours où l'enseignante essayait d'employer la pédagogie dite critique. Des étudiants ont été interrogés sur la stratégie pédagogique du cours et son effet sur leurs apprentissages.
La seconde communication s'appuie sur une enquête effectuée par entretiens dans plusieurs universités britanniques sur l'apport des technologies numériques aux apprentissages. La qualité des apprentissages est appréciée ici indirectement à partir de l'engagement dans les apprentissages que peuvent susciter ou non ces technologies.
La troisième communication s'intéresse au développement des compétences à travailler en groupe à partir d'une expérience répétée de travail en groupe dans divers enseignements. L'enquête réalisée se fonde sur un ensemble d'entretiens menés avec des étudiants d'une grande école de management française.
Le débat sur la question transversale sera organisé à partir d'un exposé introductif fait par les trois intervenants. Nous interrogerons l'origine de notre questionnement sur la qualité des apprentissages qui, s'il est en phase avec les évolutions de l'enseignement supérieur, opère néanmoins un décalage par rapport aux préoccupations et aux pratiques des acteurs plus centrées sur l'évaluation des formations et des enseignements. La question « comment les chercheur-e-s s'arrangent-ils avec les cadrages que d'autres leur proposent » sera donc centrale dans ce débat. Elle sera abordée dans une perspective comparative France-Grande Bretagne.
Références.
Biggs, J. (2001). The reflective institution : assuring and enhancing the quality of teaching and learning. Higher Education, 41, 221-238.
Biggs, J. & Collis, K. (1982). Evaluating the quality of learning : the SOLO taxonomy. New York : Academic Press.
Rege Colet, N (2003). Evaluation des enseignements et pilotage de l'Université. L'éducation en débat : analyse comparée, 3, 83-95.
Romainville, M. (2009). Une expérience d'élaboration collective de critères de qualité. In M. Romainville & C. Coggi (Eds.), L'évaluation de l'enseignement par les étudiants (145 – 163). Bruxelles : De Boeck.
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