Présentation du symposium
1. Du lien entre 2 symposia
Nous nous appuyons ici sur une ample recherche tant sur le volume et le type de données recueillies que sur l'équipe de recherche mobilisée : le projet Sum-Tec qui vise à définir et analyser les conditions et la nature de l'innovation liée à la médiatisation technologique du savoir scientifique.
Cette recherche, comme celle qui l'a précédée[1], a soulevé, la question de la familiarité avec l'objet de recherche. En effet, comment des chercheurs en sciences humaines et sociales (de 7ème, 70° et 71° sections) peuvent-ils travailler ensemble sur un objet de recherche aussi proche de leurs pratiques et de leurs cultures socioprofessionnelles ?
En s'appuyant sur le postulat selon lequel la neutralité relève de la capacité d'empathie du chercheur lui permettant de « se décentrer par rapport à lui-même» (Jodelet, 2003, p.149), 2 sous-équipes du projet ont fait le choix d'aborder ce questionnement sous deux angles différents et complémentaires, le présent symposium et celui intitulé « Enseignants et étudiants, relations en médiation sous les regards croisés de la pluridisciplinarité ».
2. Du contexte social et méthodologique de la recherche
La richesse du projet Sum-Tec repose sur :
- la diversité disciplinaire des chercheurs impliqués dans la collecte comme dans le traitement des données (2 chercheurs en linguistique, 7 chercheurs en sciences de l'information et de la communication et 6 chercheurs en sciences de l'éducation) qui a permis de croiser des approches complémentaires ou divergentes obligeant à définir les paradigmes et les concepts propres à chacun, de façon d'autant plus rigoureuses.
- la taille et la dimension multimodale du corpus construit par le projet que nous détaillons ci-dessous.
Le corpus a été construit en deux phases :
- une phase de recueils de parole (2014). Des entretiens semi-directifs ont été enregistrés auprès de 63 enseignants, couvrant tous les niveaux du L et du M dans 11 disciplines pour des cours en présentiel et à distance.
- une phase d'observation en contexte (2015). Huit cours ont été suivis dans leur intégralité (soit 34 séances de cours en présentiel et un cours à distance).
3. De la question spécifique des usages pédagogiques du numériques par des enseignants-chercheurs en SHS et de la réflexivité de l'équipe de recherche
Nombre de travaux, notamment, en SHS montrent qu'au vue de l'impossible neutralité des chercheurs, la question de la rigueur méthodologique réside dans l'adoption d'une « posture réflexive » avec le terrain (Jodelet, 2003, p.150).
A travers les trois communications composant ce symposium, nous nous proposons, d'une part, de donner à voir comment les enseignants-chercheurs se représentent leur propres pratiques pédagogiques. Plus spécifiquement, nous montrerons :
- Quelles modalités relationnelles et interactionnelles que les enseignants-chercheurs mettent-ils en place avec les étudiants lorsqu'ils choisissent d'utiliser des outils numériques, en particulier la messagerie électronique, les forums et plus largement les LMS (Didier Baltazart) ;
- Comment les enseignants-chercheurs se représentent-ils le rôle et la place des outils numériques dans leurs pratiques pédagogiques (Catherine Kellner) ;
- En quoi l'usage du numérique constitue une opportunité de questionnement pédagogique pour les enseignants-chercheurs, notamment sur les espaces-temps de l'acte d'apprendre et d'enseigner (Nathalie Lavielle-Gutnik).
Concomitamment, nous nous emploierons à montrer que si l'équipe de recherche s'est employée à élaborer une réflexion distanciée sur son objet de recherche, elle n'a pas tenté de nier son implication personnelle et a plutôt fait le choix d'en faire un objet de travail. En effet, à la suite de Whittington (2006), nous considérons que tout chercheur a à s'interroger sur sa pratique ce que nous ferons à travers une réflexion sur les points suivants :
- La recherche Sum-tec comme terrain spécifique, intriqué dans des environnements organisationnels, sociétaux permettant d'aborder la complexité de l'objet (Latour, 2001) ;
- Le choix d'une démarche réflexive comme « une analyse de son expérience passée, présente, future et conditionnelle » (Paturel, 2009, 8).
Le symposium s'organisera en trois temps : après une présentation du contexte et de la méthodologie de recueil et d'analyse des données de la recherche, chacun des 3 communicants se proposera de donner à voir les points saillants de ses analyses des représentations des pratiques pédagogiques médiatisées du public concerné.
Enfin, à l'aune d'exemples et d'expériences vécues par chacun des communicants et par l'ensemble du groupe, il s'agira de débattre des modalités concrètes de ce qu'est une pratique de réflexivité au sein d'une équipe de recherche.
[1] Tec-Meus, recherche réalisée, entre en 2009 et 2011, pour une présentation détaillée des résultats, voir Barbot M-J., Massou, 2011, Statuts, professionnalité des enseignants-chercheurs et usages des TIC. In M.-J. Barbot, L. Massou L. (Éds). TIC et métiers de l'enseignement supérieur : émergences, transformations, Nancy : Presses universitaires de Nancy, 145-164
Eléments bibliographiques
Drucker-Godard, C. « De l'observation du chercheur à l'accompagnement du dirigeant », @GRH 2013/1 (n° 6), p. 67-89 ; DOI 10.3917/grh.131.0067
Jodelet, D. (2003), « Aperçus sur les méthodologies qualitatives », in Moscovici S. et Buschini F. (Dir.), Les méthodes des sciences humaines, Paris : PUF Fondamental, pp. 139-162
Latour, B., 2001, Le métier de chercheur, regard d'un anthropologue, Paris, INRA éditions.
Paturel, D. (2009). L'implication au cœur d'un processus de recherche. 20e Congrès AGRH, Méthodes émergentes et recherche en GRH, Toulouse, 9-11 septembre.
Pierozak, I. « Se construire comme enseignant-chercheur une pratique professionnelle de la réflexivité », Cahiers de sociolinguistique 2009/1 (n° 14), p. 57-66. DOI 10.3917/csl.0901.0057
Whittington, R. (2006). Completing the practice turn in strategy. Organization Studies, vol. 27, n°5, 613-634.
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