4-7 juil. 2016 Mons (Belgique)
Peut-on mesurer l'effet de la composition scolaire ?
Julien Danhier  1@  , Emilie Martin  2@  , Alejandra Alarcon  3@  , Rob Kaelen  1@  , Dirk Jacobs  1@  
1 : Group for research on Ethnic Relation, Migration and Equality, Université Libre de Bruxelles  (GERME - ULB)  -  Site web
Université Libre de Bruxelles Institut de sociologie - GERME - S.14.105 Avenue Jeanne, 44 - CP124 B-1050 Bruxelles -  Belgique
2 : Group for research on Ethnic Relation, Migration and Equality, Université Libre de Bruxelles  (GERME - ULB)  -  Site web
Université Libre de Bruxelles Institut de sociologie GERME, bur. S14-206 avenue Jeanne, 44 CP 124 B-1050 Brussels (BELGIUM) -  Belgique
3 : Group for research on Ethnic Relation, Migration and Equality, Université Libre de Bruxelles  (GERME - ULB)  -  Site web
Université Libre de Bruxelles Institut de sociologie GERME, bur. S14-216 avenue Jeanne, 44 CP 124 B-1050 Brussels (BELGIUM) -  Belgique

L'effet de composition peut être défini comme l'effet supplémentaire des caractéristiques individuelles agrégées au niveau de la classe ou de l'école une fois que l'effet de ces caractéristiques a été pris en compte au niveau individuel. Dit plus simplement, il représente l'effet propre du regroupement des élèves. La recherche a montré que cette composition est significativement associée aux résultats des élèves (Condron, 2009; Dumay & Dupriez, 2008; Sykes & Kuyper, 2013). Ce concept s'est révélé essentiel pour comprendre comment les écoles sont enchevêtrées dans des processus de reproduction sociale : les élèves d'origine défavorisée sont doublement pénalisés puisqu'ils présentent des résultats plus faibles et leur tendance à être scolarisés d'autres élèves défavorisés est associée à des résultats encore plus faibles. Ce concept, essentiellement statistique, reste pourtant au centre d'un vif débat. Ce débat concerne tant son contenu (les processus qu'il traduit ou par lesquelles il s'exprime) que sa mesure technique. Ce débat constitue le corps de notre présentation puisque nous y discuterons la validité et la fiabilité d'un tel concept statistique.

Une première difficulté réside dans la définition de ce que l'on prétend mesurer. Différents types de composition (académique, socioéconomique ou ethnique) peuvent être considérés. Thrupp et ses collègues (2002) proposent d'intégrer systématiquement ces différents types, mais l'instabilité des coefficients rend problématique la mise en pratique de ce conseil. De plus, lorsque l'on examiner les processus pouvant expliquer cet effet de composition, peu d'effets significatifs se dégagent. Nous pouvons dès lors supposer qu'il traduit une accumulation de petits effets concernant tant les interactions entre étudiants, les attitudes et pratiques du corps enseignant que l'organisation des écoles. Thrupp (1999) doute d'ailleurs que des modèles statistiques puissent mesures ces effets et nous invite à une approche plus qualitative. Une seconde difficulté réside dans la définition d'un modèle statistique. Un tel modèle est littéralement gourmand en termes de données (Raudenbush & Willms, 1995). Il requiert un ensemble important de données relatives aux élèves (notamment, des mesures de la réussite à plusieurs moments et une mesure fiable de l'origine socioéconomique), l'identification de tous les niveaux pertinents (notamment la classe et l'école) ainsi qu'un nombre suffisant d'unités statistiques à chacun de ces niveaux. Peu d'analyses pouvant prétendre disposer de telles données, cet effet pourrait être un artefact statistique comme le prétendent Harker et Tymms (2004). Enfin, une troisième difficulté réside dans le recours à des méthodes de plus en plus complexes. Récemment, Marsh et ses collègues (2009) ont montré que la modélisation de l'effet de la composition nécessite la prise en compte simultanée des erreurs d'échantillonnage et de mesure. Un modèle dit « doubly latent » combinant l'analyse structurelle et l'analyse multiniveau est requis sous peine de surestimer l'effet de la composition.

Regard réflexif sur la question de recherche

Cette question est particulièrement cruciale dès lors que de nombreux chercheurs utilisent pour mesurer l'effet de composition, des bases de données qui ne rencontrent pas les prérequis (notamment celles de l'OCDE et de l'IEA). Plus fondamentalement, l'extension du recours à des bases de données existantes apparait comme problématique dans le traitement de certaines questions. La redéfinition des hypothèses imposée par l'analyse secondaire peut rendre le chercheur aveugle à certains phénomènes.

Références bibliographiques

Condron, D. J. (2009). Social class, school and non-school environments, and black/white inequalities in children's learning. American Sociological Review, 74(5), 685–708.

Dumay, X., & Dupriez, V. (2008). Does the school composition effect matter? Evidence from Belgian data. British Journal of Educational Studies, 56(4), 440‑477.

Harker, R., & Tymms, P. (2004). The effect of student composition on school outcomes. School Effectiveness and School Improvement, 15, 177–199.

Marsh, H. W., Lüdtke, O., Robitzsch, A., Trautwein, U., Asparouhov, T., Muthén, B., & Nagengast, B. (2009). Doubly-Latent Models of School Contextual Effects: Integrating Multilevel and Structural Equation Approaches to Control Measurement and Sampling Error. Multivariate Behavioral Research, 44(6), 764‑802.

Raudenbush, S. W., & Willms, J. D. (1995). The Estimation of School Effects. Journal of Educational and Behavioral Statistics, 20(4), 307‑335.

Sykes, B., & Kuyper, H. (2013). School Segregation and the Secondary-School Achievements of Youth in the Netherlands. Journal of Ethnic and Migration Studies, 39(10), 1699–1716.

Thrupp, M. (1999). Schools Making A Difference. Buckingham: Open University Press.

Thrupp, M., Lauder, H., & Robinson, T. (2002). School composition and peer effects. International Journal of Educational Research, 37(5), 483‑504.


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