Lorsque sont évoquées (selon les cas par les professionnels, les médias, les tutelles) les innovations pédagogiques émergeant en contexte éducatif, l'idéal des bonnes pratiques constitue toujours un modèle de référence pour interroger « l'agir innovationnel » (Cros, 2007) : en d'autres termes ce sont les traits de surface du dispositif qui sont souvent considérés comme déterminants d'une innovation, plutôt que les processus, les principes et la dynamique d'invention qui les sous-tendent.

La présente communication se propose d'interroger les modalités de coopération d'une équipe qui met en œuvre quotidiennement, dans une école primaire, un dispositif pédagogique innovant. Il s'agit d'interroger des « manières de faire », coopératives, telles qu'elles sont élaborées et vécues par l'équipe, en les interrogeant selon quatre axes : l'histoire de l'émergence de ces modalités d'agir coopératif ; la dynamique de mise en sens de ces modalités, au fil notamment d'activités qui visent à nommer à la fois l'esprit et la fonction de ces méthodes ; l'articulation, entre elles et avec les autres aspects du dispositif pédagogique, de ces modes de coopération ; les registres normatifs qui structurent l'action et la manière dont ils sont ou non explicités.

L'objectif de cette attention portée à quatre dimensions de l'innovation pédagogique (historicité, signification, caractère systémique, normativité), entendues ici comme conditions de l'implication (Lourau, 1970) des équipes dans le dispositif et de son investissement symbolique (Lantz, 1998), est notamment de mettre en problème la question de la coopération en situation de travail dans le cadre de la construction en cours d'un projet de recherche-action participative (Fals-Borda & Anisur Rahman, 1991) qui, sur la base d'une recherche exploratoire menée pendant 18 mois, propose à l'équipe de déterminer des questions de recherche et de construire une démarche méthodologique. Cette réflexion s'appuiera sur l'observation d'une dimension spécifique du travail en équipe : celle qui organise un dispositif de co-enseignement, appuyé notamment sur la ressource que constitue la démarche « plus de maîtres que de classes », et qui est articulée à une « évaluation partagée des pratiques » pédagogiques.

Regard réflexif :

À l'intersection des visées de compréhension et d'évaluation, cette communication propose, pour comprendre l'innovation pédagogique, de se concentrer non sur les traits de surface qui constituent un dispositif pédagogique, mais sur la dynamique sous-jacente qui organise l'émergence et la mise en œuvre de ce dispositif, dynamique envisagée comme déterminante des effets de la pratique pédagogique.