L'un des axes du projet de recherche collaborative conduit dans cette école élémentaire d'un quartier populaire de Paris concerne les pratiques de français dans les classes. Entre avril et juin 2015, nous avons observé intégralement un dispositif de co-enseignement dénommé « évaluation partagée des pratiques », qui portait sur la production d'un écrit spécifique, la devinette, dans une classe de cycle 2 (CP/CE1). Notre corpus de données comprend les enregistrements audios de neuf réunions de préparation/débriefing entre les deux enseignantes impliquées, les enregistrements vidéos des neuf séances de classe qu'elles ont conduites, des documents complémentaires dont des productions d'élèves et les supports pour ces productions.

Dans un premier temps, nos analyses ont traité ces données selon deux regards distincts et deux cadres théoriques différents, didactique et pédagogique, et en investiguant principalement deux aspects :

- la construction et la régulation de la séquence par les enseignantes : choix d'un genre textuel, objectifs et démarches d'apprentissage ; contraintes d'adaptation correspondant à des finalités didactiques (forme scolaire du genre littéraire, analyse des supports proposés, types de texte et cohérence textuelles, vocabulaire) et pédagogique (différenciation, motivation/attention, aide aux élèves en difficulté, modalités d'organisation, contenus des discours pédagogiques) ;

- l'objet au centre de la séquence (la devinette) : questionnements sur les caractéristiques d'un genre ; écart entre un genre textuel et sa variante scolaire (Schneuwly et Dolz, 1997) ; facilités/difficultés ; notions et concepts qui font obstacle, opérations mentales à mobiliser (Astolfi, 1992 ; Barth, 2013).

C'est le croisement des analyses et des cadres théoriques (pédagogique et didactique) qui sera l'objet de la communication. Nous postulons en effet que pédagogie et didactique, dont les rapports ont parfois été complexes voire conflictuels (Marchive, 2008 ; Reuter, 2011), sont deux points de vue « solidaires » (Halté, 1988) et articulables sur les situations d'enseignement et d'apprentissage. Ce qui nous intéresse est donc de réfléchir à ce que chaque approche permet – ou non – de voir et de comprendre quant à la séquence analysée, et comment chacune essaie de prendre en compte – ou non – dans ses analyses la double dimension pédagogique et didactique.

Regard réflexif :

Inscrite dans l'axe « proposer » du congrès, cette communication étudie une pratique en croisant deux lignes de recherche, postulant la complémentarité des regards didactique et pédagogique. Elle s'efforce aussi d'opérer des liens entre des questions de terrain soulevées par des enseignants et des questionnements transversaux portés par des chercheurs.