En sciences de l'information et de la communication, le dispositif info-communicationnel, combinant dimension technique, spatiale et sociale est analysé pour ses enjeux de partage et de mise en circulation des savoirs dans des contextes contemporains divers (Couzinet, 2009). Nous avons ainsi étudié successivement deux dispositifs info-communicationnels que l'on peut qualifier de « simple » ou « micro », mettant en œuvre un réseau national et un établissement culturel. Le premier, le SCREREN-CNDP[1] a été analysé comme le réseau de médiation documentaire de l'Education nationale (Fraysse, 2009). Le second, le musée Saint-Raymond, musée des antiques de Toulouse, a été envisagé comme un dispositif documentaire de médiation présentant des œuvres mais aussi des documents et toute une gamme d'objets médiateurs (Fraysse, 2013).
Souhaitant poursuivre ce travail d'observation des dispositifs de médiation dans le domaine des musées, nous avons commencé à interroger des professionnels du patrimoine engagés dans le renouvellement des mises en espace des œuvres et des discours qui les accompagnent (Pia-Vitalli, 2015 ; Vigouroux, 2015). Le terrain du musée du Louvre est particulièrement riche pour cette observation des dispositifs de médiation. En effet, la réorganisation de certains espaces d'exposition et la création de nouveaux espaces d'accueil des publics dessinent, depuis quelques mois, de nouvelles possibilités de médiation et de mise en valeur des œuvres et un renouvellement des discours. Or, il semble que ces nouveaux dispositifs de médiation proposent un deuxième axe de réflexion, « celui du jeu dans le dispositif, celui de la marge de manœuvre (Lévi-Strauss, 1962) qui permet aux destinataires de s'approprier et d'habiter le dispositif ». D'autres récits et d'autres interprétations sont proposés à partir d'oeuvres originales mais aussi d'objets médiateurs originaux. Nous l'aborderons selon l'axe « du cadre, de l'agencement, de l'articulation d'éléments hétérogènes » (Foucault, 1977) autrement dit par rapport aux dispositifs de présentation des œuvres dans l'espace proposant un nouveau récit. En prenant l'exemple du Département des arts de l'Islam, du Louvre Lens ou du projet du Louvre Abu Dhabi il est possible de deviner les prémisses d'un macro dispositif de ce nouveau grand Louvre. Par ailleurs, la toute nouvelle Petite galerie et le futur Centre d'interprétation qui sera installé dès juin 2016 dans le pavillon de l'horloge suscitent de nouvelles interrogations sur la notion de dispositif et de mise en espace tout en proposant de nouvelles interprétations des objets. L'observation sur le terrain et des entretiens semi-directifs avec les responsables de ces lieux constitueront le cœur de notre méthode de recueil de données.
Ces deux axes de la notion de dispositif, mis en œuvre par une même institution, le musée du Louvre, dans des espaces différents et à l'occasion de moments singuliers, instituent ce qu'on pourrait nommer des micro dispositifs au service du macro dispositif qu'est devenu le Louvre le « plus grand musée du monde ». Le Louvre se positionne ainsi à la fois comme la tête d'un réseau, autre manière de suggérer le macro dispositif et comme laboratoire d'expérimentations de dispositifs de médiation.
Ce questionnement de la notion de dispositif au musée envisagera à la fois la structure du réseau mais aussi les discours proposés et les imaginaires suscités. La réflexion s'organisera autour d'une proposition de définition de la notion de dispositif de médiation afin de distinguer la dimension micro et la dimension macro du Louvre et leurs imbrications éventuelles. Elle proposera un retour sur la prétention à l'universalité du Louvre vécu comme un espace de pouvoir et d'institution d'un discours esthétique sur des objets d'histoire puis discutera sa position d'incubateur d'espaces de potentialité de médiation dans ces expérimentations et ces espaces de recueil de la parole des publics.
[1] Ce réseau de création et d'accompagnement pédagogique s'appelle aujourd'hui Canopé
- Présentation