Cette communication présentera les résultats d'un projet ANR consacré aux inégalités éducatives qui s'est déroulé de 2012 à 2015. Les enquêtes sur les pratiques culturelles (Donnat, 2008) donnent un certain nombre de repères sur les inégalités mais occultent celles des moins de 15 ans. A cette période, les adolescents développent pourtant une réelle autonomie vis-à-vis de leur famille, construisent leurs propres goûts et préférences et sont également moins assujettis aux choix parentaux et aux activités familiales (Pasquier, 2005). Parmi les récentes enquêtes qui prennent en compte les activités numériques des adolescents, on peut citer celle sur l'enfance des loisirs (Octobre, Détrez, Mercklé et Berthommier, 2010) qui étudie leurs trajectoires culturelles en les interrogeant à 11, 13, 15 et 17 ans. Notre hypothèse de départ est différente. Elle pose que les contextes influencent les parcours éducatifs des jeunes dans l'institution scolaire, dans leurs loisirs sportifs et culturels et dans leurs pratiques numériques. La dimension spatiale de ces contextes joue un rôle central, que ce soit par le vecteur des distances métriques ou par celui des distances sociales et culturelles. L'équipe et la recherche ANR étaient interdisciplinaire (sciences de l'éducation, géographie, sociologie, anthropologie, sciences de l'information-communication). Des méthodes inductives et comparatives ont été retenues pour mesurer et analyser les inégalités éducatives. La comparaison, sur le plan quantitatif, de trois territoires régionaux (Aquitaine, Basse-Normandie et Bretagne) et sur le plan qualitatif, de la situation de trois espaces ruraux, périurbains et urbains sélectionnés dans chacune de ces régions, a montré la diversité des politiques d'éducation mises en œuvre et plus globalement des types d'effets de lieu sur les parcours éducatifs des jeunes. La conjugaison de méthodes quantitatives et qualitatives a produit un corpus d'observations très riche (3.356 questionnaires élèves, 1.058 questionnaires parents, 9 monographies de sites). S'agissant des pratiques numériques, les jeunes de milieu défavorisé ont plus souvent accès aux ordinateurs portables dans leur chambre. Les disparités sociales se creusent quant à l'équipement en téléphones portables. En effet, près de quatre adolescents sur cinq issus de milieu défavorisé possèdent un téléphone portable contre deux adolescents sur trois d'origine sociale favorisée. Les analyses qualitatives nous permettent d'identifier un investissement inégal des familles dans le rapport au numérique qui se retrouve dans le type et le lieu d'accès à l'équipement. Dans un souci de justice sociale et spatiale, nos résultats montrent aussi de quelle manière certains professionnels s'efforcent de compenser les inégalités liées aux situations sociales et aux territoires, particulièrement dans les zones rurales « blanches » mal ou non desservies par les réseaux internet.
Bibliographie
- Donnat, O. (2008). Les pratiques culturelles des français à l'ère du numérique. Paris : La Découverte.
- Octobre, S., Détrez, C., Mercklé, P. et Berthommier, N. (2010). L'Enfance des loisirs. Trajectoires communes et parcours individuels de la fin de l'enfance à la grande adolescence. Paris : Ministère de la Culture et de la Communication, DEPS.
- Pasquier, D. (2005). Cultures lycéennes, la tyrannie de la majorité. Paris : Autrement.
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