4-7 juil. 2016 Mons (Belgique)

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Confronter le praticien à ses propres résultats dans une démarche de recherche : prises de conscience, apports et défis méthodologiques
Catherine Lanaris  1@  , Johanne April  1@  , Martine Nadon  1@  
1 : Université du Québec en Outaouais  -  Site web
Case postale 1250, succ. Hull, Gatineau, Québec J8X 3X7 -  Canada

Résumé:

Dans le cadre d'une recherche longitudinale portant sur les conditions d'implantation de la maternelle quatre ans Temps Plein en Milieu Défavorisé au Québec, nous avons utilisé l'outil d'observation Classroom Assessment Scoring System (CLASS) (Pianta, La Paro et Hamre, 2008) afin de mesurer la qualité éducative dans quatre classes participant au projet de recherche. Cet outil mesure la qualité des interactions entre l'enseignante et ses élèves sur trois domaines : le soutien émotionnel, le soutien à l'apprentissage et l'organisation de la classe. Chaque domaine est composé de plusieurs dimensions et les observations attribuent à chaque domaine un score pouvant varier de 1 à 7. Ainsi, plus un score s'approche du 7, plus les interactions sont d'un niveau élevé de qualité. Par surcroît, des études confirment que la qualité relationnelle coconstruite par l'enfant avec son enseignante durant les premières années d'école, peut avoir des incidences à long terme sur son adaptation sociale, émotionnelle et comportementale (Driscoll, Wang, Mashburn et Pianta, 2011). Lorsque le soutien émotionnel et le soutien à l'apprentissage offerts par l'enseignant sont de qualité élevée, les élèves considérés à risque bénéficient d'un facteur de protection important (Gosse, McGinty, Mashburn et Invernizzi, 2012; Pianta, Nimetz & Bennett, 1997). Dans la cadre de notre recherche, l'analyse des données issues de cet outil d'observation a mis en évidence que, même si les quatre enseignantes se situent dans une qualité éducative globale de niveau moyen ou élevé, il existe plusieurs variations dans les scores obtenus aux différents domaines et dimensions au cours d'une même année en deux temps d'observation. Par conséquent, la compréhension des résultats de notre recherche nous paraissait limitée. En fait, comme chercheuses, nous pouvions formuler des hypothèses sur l'explication de ces variations, mais les explications réelles sur le sens des interactions ne pouvaient provenir que des participantes elles-mêmes. Ainsi, il nous fallait ajouter un outil méthodologique qui nous permettrait d'approfondir notre compréhension et proposer une explication plus complète pouvant rendre compte des écarts dans les pratiques relationnelles observées. Les questions suivantes se sont ajoutées à notre questionnement de recherche : quels sont les facteurs qui, selon chaque enseignante, peuvent influencer la qualité des interactions qu'elle développe avec ses élèves?  Quel est le meilleur outil méthodologique permettant d'y avoir accès? Afin de répondre à ces questionnements, et dans le but d'assurer une compréhension approfondie qui tient compte du point de vue des acteurs, nous avons proposé à nos participantes de prendre la parole et d'expliquer leurs résultats, notamment les écarts observés dans différentes dimensions, ainsi que d'en amorcer une interprétation. Pour ce faire, nous leur avons présenté les résultats de leurs interactions avec les élèves (données CLASS) lors d'un entretien d'autoconfrontation (Goigoux, 2007) qui consistait à présenter à chacune  le portrait descriptif de ses interactions avec ses élèves. Chaque enseignante a été « confrontée » à ses résultats pour deux années de passation (pré et post-test).  Sans aucun regard évaluatif, les enseignantes ont pu expliciter leurs résultats ainsi que le sens qu'elles y donnent. La communication présentera les résultats de ces entretiens et les défis méthodologiques d'une telle démarche. L'entretien d'autoconfrontation est alors conçu pas seulement comme une modalité de collecte de données, mais aussi comme un outil de développement professionnel par les prises de conscience qu'il génère chez les participantes. Au-delà d'une visée méthodologique pour une meilleure compréhension des résultats, la démarche de collecte de données que nous avons mise en place a permis à certaines enseignantes de mieux comprendre les interactions qu'elles mettent en place dans leur classe et de proposer aux chercheuses des pistes d'interprétation. Les analyses pour chaque enseignante ont permis de dégager différentes postures lors de cet entretien. C'est ainsi que nous avons observé une posture de résistance justifiant tous les résultats, une posture d'étonnement qui fournit des explications, souvent basées sur les élèves seulement et une posture plus analytique qui amorce, lors de l'entretien, une réflexion sur ses pratiques au regard de ses interactions avec les élèves. Les enseignantes ayant adopté cette dernière posture semblaient aussi planifier des modifications de leurs pratiques. Lors de l'analyse de nos données de recherche, nous avons constaté les limites de l'interprétation et nous avons choisi de sortir du cadre méthodologique prévu en accordant aux participantes un statut particulier qui valorisait leur contribution, à travers l'autoconfrontation, à la compréhension renouvelée de notre questionnement initial et du phénomène complexe qu'est la qualité des interactions dans une classe de maternelle.

 

Regard réflexif sur la question de recherche:

Notre communication est en lien avec les interrogations du congrès relevant des dimensions du comprendre  et du proposer. Plus spécifiquement, de quelle façon l'utilisation de l'autoconfrontation permet d'améliorer, d'affiner, de reconstruire et de réorienter le questionnement de départ? Comment à partir de cet outil méthodologique les chercheuses peuvent proposer une démarche réflexive de développement professionnel qui amène les participantes à la recherche à identifier de nouveaux enjeux et défis?

Références bibliographiques:

Driscoll, K. C., Wang, L., Mashburn, A. J. et Pianta, R. C. (2011). Fostering Supportive Teacher-Child Relationships: Intervention Implementation in a State-Funded Preschool Program. Early Education and Development, 22 (4), 593-619.

 

Goigoux, R. (2007). Un modèle d'analyse de l'activité des enseignants. Éducation et didactique, vol 1 - n°3, pp. 47-70.

 

Gosse, C. S., McGinty, A. S., Mashburn, A. J. & Invernizzi, M. (2012). The Role of Relational and Instructional Classroom Supports in the Language Development of At-Risk Preschoolers: Society for Research on Educational Effectiveness.

 

Justice, L. M., Cottone, E. A., Mashburn, A. et Rimm-Kaufman, S. E. (2008). Relationships between Teachers and Preschoolers Who Are at Risk: Contribution of Children's Language Skills, Temperamentally Based Attributes, and Gender. Early Education and Development, 19 (4), 600-621.

 

Pianta, R. C., La Paro, K. M. et Hamre, B. K. (2008). Classroom Assessment Scoring System - Manual Pre-K, CLASS. Baltimore: Paul H. Brookes Publishing Co.

 

Pianta, R. C. et Stuhlman, M. W. (2004). Teacher-Child Relationships and Children's Success in the First Years of School. School Psychology Review, 33(3), pp. 444-458.

 

Pianta, R. C., Nimetz, S. L., & Bennett, E. (1997 ). Mother-child relationships, teacher-child relationships, and school outcomes in preschool and kindergarten.Early childhood reaserch quarterly, 12 (3), , 263-280.

 

 

 

 

 


 

 



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