4-7 juil. 2016 Mons (Belgique)

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L‘apprentissage du raisonnement clinique par les stagiaires en masso-kinésithérapie
Delphine Guyet  1@  
1 : Centre interdisciplinaire de recherches sur les valeurs, les idées, les identités et les compétences en Éducation et en formation EA 2657  (CIVIIC)  -  Site web
Université de Rouen : EA1657

 Masseur kinésithérapeute de formation initiale, mon intérêt porte sur la compréhension des pratiques de formation au raisonnement clinique. Celui-ci est défini comme « processus de pensée et de prise de décision qui permettent au clinicien de prendre les actions les plus appropriées dans un contexte spécifique de résolutions de problèmes de santé » (Higgs 2008). Il est au cœur des pratiques professionnelles.

Cette communication s'inscrit dans un travail de thèse en fin de deuxième année. Elle portera plus précisément sur la compréhension des liens entre apprentissage des habiletés motrices liées à l'acquisition des gestes techniques professionnels masso kinésithérapiques et apprentissages cognitifs.

La kinésithérapie est fondée sur une triade patient/soigneur/corps, dans une recherche de mobilisation du corps du patient. Elle a pour but d'apporter une autonomie au patient. Lors de la séance, l'une des premières étapes (Olry 2015) est la mise en évidence d'une problématique de soin en réalisant une enquête au sens de Dewey, dans un contexte d'incertitude. La réalisation de cette enquête peut être perçue comme les processus cognitifs mis en jeu dans l'apprentissage du raisonnement clinique médical, repérés par Audétat.( 2012)°

Pour Olry (2005) le geste thérapeutique réalisé envers le patient va au delà d'un geste technique. C'est un geste professionnel incorporé, approprié à la situation du soigné avec la distance thérapeutique adaptée aux buts poursuivis. Cette distance thérapeutique est un marqueur du métier. Un « référentiel sensitif professionnel commun » est défini.

La particularité de l'identité professionnelle du kinésithérapeute est le « corps à corps » (Olry 2015). L'acquisition de ce référentiel sensitif est une « coproduction entre geste et parole » à travers un corps médiateur, objet du soin et effecteur du soin. A travers l'apprentissage par le corps, véritable incorporation, les valeurs professionnelles sont transmises (Faure 2000) et des programmes d'actions sont élaborés par le futur professionnel permettant le développement d'habiletés motrices. C'est la compréhension de ces liens qui nous intéresse.

Dans un précédent travail, nous avions mis en évidence, par une démarche clinique réalisée auprès de professionnels, un rapport au corps qui devient vecteur du raisonnement clinique, lequel s'inspire d'une pratique, d'un regard, le « regard kinésithérapique ». Du fait de ce « corps thérapeutique » (Prel 2001), il y a donc autant de pratiques professionnelles qu'il y a de kinésithérapeutes et qu'il y a de patients. Comment le tuteur de stage prend-il en compte, dans sa régulation de l'étudiant stagiaire, ces différents aspects de la complexité de l'apprentissage des gestes professionnels ? Quel effet a la présence du malade dans cette intervention du tuteur en situation de soin ?

Cette communication s'inscrit dans le champ de la didactique professionnelle et prendra appui sur les résultats d'une recherche doctorale en cours. Nous exposerons ici les premières analyses à partir du recueil de données réalisées par auto confrontations croisées.

La population retenue est une population de professionnels libéraux volontaires pour recevoir des stagiaires dans le cadre du parcours de stage obligatoire de leur formation initiale, au sein de leur cabinet. Ils sont aussi volontaires pour participer à cette étude expérimentale d'une pratique « ordinaire », en situation réelle de soins et de tutorat dans le cadre habituel de leur activité.

La triade « patient, stagiaire, kiné» en situation de soins dans un cabinet libéral sera étudiée à travers les grilles de lectures théoriques élaborées à partir du modèle médical de supervision du raisonnement clinique ( Audetat 2012) des interactions verbales (Vinatier 2008), des gestes professionnels de l'enseignant ( Jorro 2011 , Bucheton 2009, 2014, Alin 2010 ) tout en s'enrichissant des modèles d'apprentissages gestuels utilisés en EPS (Winnikayen 1990, Choplain 2015, Parlebas 2005...), pour ne pas négliger l'aspect corporel.

A ce stade de la recherche, et au moment du dépôt de cette communication, les résultats sont encore en cours d'analyse. L'apprentissage du raisonnement clinique en masso kinésithérapie serait la définition d'une succession de gestes professionnels techniques, technologiques, et corporels. C'est un processus qui implique le futur professionnel dans son identité pour soi, dans la recherche de la compréhension de la singularité de la situation de soin. Il va au-delà d'un conditionnement professionnel. Il ne semble pas être la simple application d'une procédure technique standardisée, de mise en lien de connaissances théoriques dans un souci d'efficience des soins. « On ne nait pas kiné, on le devient ». Et si l'apprentissage du raisonnement clinique n'était qu'un moyen d'« incorporation » des gestes de son agir professionnel? Et s'il n'était qu'un processus de mobilisation, de construction et de mise en acte des savoirs au sein de la pratique professionnelle (Maubant 2012, 2013) pour un kiné « adolescent professionnel » (Bossard 2001)?



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