Intégré au double dispositif de l'Aide Sociale à l'Enfance et de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, le placement en établissement correspond à la prise en charge, en dehors de son domicile familial, d'un mineur pour une durée donnée. Cette action sociale possède une dimension spatiale forte, car elle repose sur un déplacement résidentiel pour les mineurs placés mais aussi car la situation de placement implique des conditions spécifiques de déplacements quotidiens pour ces derniers. Les modalités de sorties de l'établissement pour les adolescents, qu'elles soient autorisées ou non, invitent à interroger le rôle de la mobilité dans le placement. La mobilité est ici définie comme une « qualité des personnes » (Ripoll et Veschambre 2005) plus que comme un acte. Face à la valorisation de la mobilité (Bacqué et Fol 2007) et l'affirmation d'un nouveau paradigme (Hannam, Sheller, et Urry 2006; Sheller et Urry 2006), une approche critique de la mobilité envisage les rapports sociaux dans lesquels elle s'inscrit (Borja, Courty, et Ramadier 2013). Il s'agit alors d'analyser le rôle de la mobilité dans les relations entretenues entre l'institution, les éducateurs et les adolescents placés en foyer.
Cette communication s'appuie sur une thèse de géographie au cours de laquelle une enquête a été menée dans quatre établissements du département du Rhône. Alors que peu de recherches en géographie ont pour objet le placement, les acteurs rencontrés dans le cadre de cette thèse ont eux-mêmes montré un étonnement face à son inscription disciplinaire. Ainsi, au-delà de la manière dont les différents acteurs du placement utilisent la mobilité dans leurs pratiques quotidiennes, cette communication questionne la mobilisation, par ces mêmes acteurs, de la mise en évidence de la dimension spatiale du placement.
Plusieurs méthodes ont permis d'analyser les enjeux associés à la mobilité dans les établissements de l'enquête, notamment des entretiens avec des éducateurs et des observations réalisées dans une démarche ethnographique.
Ces différents matériaux mettent dans un premier temps en évidence les différents rôles d'ajustement de la mobilité dans le contexte du placement. Dans un deuxième temps, cette dimension spatiale du placement faisant écho à certaines préoccupations des équipes éducatives pourrait être mobilisée par ces dernières. Enfin, ce transfert semble dépendre de la nature des connaissances produites par la recherche mais surtout de la pratique du chercheur et interroge plus particulièrement son positionnement sur le terrain.
Bibliographie :
Bacqué, M.H., Fol. (2007). L'inégalité face à la mobilité, du constat à l'injonction. Revue suisse de sociologie, 33 (1), 89-104.
Borja, S., Courty, G., Ramadier, T. (2013). De la valorisation de la mobilité à la domination par la mobilité ou comment la mobilité dit, fait et dispose l'individu. Regards sociologiques, 45-46, 101-110.
Hannam, K., Sheller,M., Urry, J. (2006). Editorial : mobilities, immobilities and moorings. Mobilities, 1 (1), 122. doi:10.1080/17450100500489189.
Ripoll, F., Veschambre, V. (2005). Sur la dimension spatiale des inégalités: contribution aux débats sur la “mobilité et le capital spatial. Rural-urbain. Nouveaux liens, nouvelles frontières, 467- 483. Rennes: Presses universitaires de Rennes.
Sheller, M., Urry, J. (2006). The new mobilities paradigm. Environment and Planning A, 38, 207- 226. doi:10.1068/a37268.