Dans un contexte où la complexité du métier a des conséquences négatives telles que le décrochage professionnel (Karsenti et al., 2015) ou la détresse psychologique chez les enseignants (Houlfort et Sauvé, 2010), il n'en reste pas moins que certains d'entre eux réussissent tout de même à rester passionnés malgré les obstacles. Cette passion de l'enseignement, un élément clé du bien-être, peut toutefois constituer un facteur de mal-être si l'enseignant ne la contrôle pas.
En se basant sur la théorie dualiste de la passion (Vallerand, 2015), l'objectif de cette communication est de présenter un modèle élaboré par Goyette (2014) qui représente le processus de construction identitaire des enseignants au regard de la passion en enseignement et cela, dans une temporalité. En effet, deux types de passion (harmonieuse et obsessive) se côtoient durant les trois phases de développement professionnel des enseignants, qui sont la formation initiale, l'insertion professionnelle et la formation continue (Mukamurera, 2014).
Toutefois, l'analyse de ce processus permet d'affirmer que durant les phases de la formation initiale et de l'insertion professionnelle, les étudiants et les enseignants novices passionnés développent davantage une passion obsessive, ce qui peut parfois conduire à la détresse psychologique chez certains d'entre eux. Cependant, une remise en question relative aux expériences vécues durant les premières années de pratique transformera graduellement cette passion obsessive pour qu'elle devienne, dans certains cas, harmonieuse.
Dans d'autres cas, l'autoréflexion de ces enseignants les mènera à l'abandon de la passion, sans toutefois abandonner le métier. Ce fait engendre un questionnement relatif aux facteurs favorisant l'émergence de cette passion et sur les prédispositions liées à la personnalité de ces enseignants. Enfin, une réflexion sera amorcé sur l'importance de développer des compétences psychologiques chez les enseignants afin d'apprivoiser cette passion de l'enseignement qui a une incidence notable sur leur bien-être (ou mal-être) au travail et le développement de leur identité professionnelle.
Regard réflexif
Nos questions s'ancrent dans une perspective compréhensive pour soutenir la réflexion actuelle sur le décrochage professionnel des enseignants et proposer des leviers. Quels facteurs favorisent l'émergence de la passion au cours de la formation initiale et de l'insertion professionnelle? Comment cette passion permet de construire une identité professionnelle affirmée et positive malgré la complexité ? Y-a-t-il certains traits de personnalité prédisposant certains enseignants à développer la passion pour l'enseignement ?
Références
Goyette, N. (2014). Le bien-être dans l'enseignement : étude des forces de caractère chez des enseignants persévérants du primaire et du secondaire dans une approche axée sur la psychologie positive. Thèse de doctorat en sciences de l'éducation, Université du Québec à Trois-Rivières.
Houlfort, N. et Sauvé, F. (2010). La santé psychologique des enseignants de la Fédération autonome de l'enseignement. Montréal, Québec : École nationale d'administration publique.
Karsenti, T., Molina, C., Desbiens, J.-F., Gauthier, C., Gervais, C., Lepage, M., ...Collin, S. (2015). Analyse des facteurs explicatifs et des pistes de solution au phénomène de décrochage chez les nouveaux enseignants, et de son impact sur la réussite scolaire des élèves. Rapport de recherche. Programme d'actions concertées. MELS et FRQSC. 1e juin 2015.
Mukamurera, J. (2014). Le développement professionnel et la persévérance en enseignement. Éclairage théorique et état des lieux. Dans L. Portelance, S. Martineau et J. Mukamurera (dir.), Développement et persévérance professionnels dans l'enseignement. Oui, mais comment? (p. 9-33). Québec : Presses de l'Université du Québec.
Vallerand, R.J. (2015). The psychology of passion. New York : Oxford University press.