4-7 juil. 2016 Mons (Belgique)
L'émergence des options dans la recherche : un choix entre les intérêts scientifiques et professionnels du chercheur
Emeric Offenstein  1@  
1 : Centre de Recherche sur la Formation  (CRF)  -  Site web
Conservatoire National des Arts et Métiers [CNAM] : EA1410
2, rue Conté 75003 Paris -  France

 

Cette communication s'appuie sur les travaux d'une recherche en cours d'élaboration et ayant pour objectif la description des actions réalisées par l'ergothérapeute lors de ses interactions avec le patient. S'apparentant par bien des aspects à une démarche d'analyse de l'activité en situation de travail, selon les conceptions classiques de l'ergonomie francophone (Ombredanne & Faverge, 1955, Leplat, 1997), une telle recherche revêt des enjeux important pour les ergothérapeutes français. En effet, la profession jouit ces dernières années d'une croissance forte, tant au niveau du nombre de professionnels formés qu'au niveau des pratiques professionnels développées. Dans ce contexte, les ergothérapeutes voient, dans toutes démarches de recherche les concernant, la possibilité d'asseoir la profession et de s'approprier un champ de pratique. Aussi la présente contribution explore le questionnement suivant : quelles influences des aspirations professionnels sur l'élaboration de l'objet de recherche et la conduite de l'investigation du terrain par le chercheur ?

Etant nous-mêmes traversé par les aspirations professionnelles sus-citées, l'originalité de notre exposé tient ici dans le double statut du chercheur : à la fois maître d'œuvre du travail de recherche en tant que doctorant, et professionnel ergothérapeute intéressé par les résultats. Avantageux par les facilités d'accès au terrain qu'il procure, ce double positionnement constitue aussi une source de difficultés. Il nous oblige à nous considérer comme destinataire des résultats de la recherche, et donc plus susceptible d'influencer son élaboration. La démarche d'investigation se doit donc d'être très prudente. Dans cette optique, nous empruntons à Strauss et Glaser la méthode de « comparaison continue » (1967, 1992) pour nous obliger à reconsidérer les options possibles et les constructions que nous réalisons à chaque étape, à la fois dans l'investigation du terrain et dans le traitement des données recueillies. Ensuite, et afin de s'inscrire dans une démarche d'analyse d'activité, nous empruntons à Theureau (2004) et à l'anthropologie cognitive la méthode d'entretien par autoconfrontation, développée dans une théorie générale dite du « cours d'action ». Cette technique d'entretien, où la personne visionne des traces de son activité à partir d'enregistrements vidéo, à pour objectif d'aider l'acteur à décrire, commenter ou mimer la dimension subjective de son activité.

Dans ce symposium, nous nous proposons de montrer comment s'est effectué le choix de la situation professionnelle à étudier. Nous décrirons également la négociation, encore à l'œuvre, sur la détermination des actions du professionnel à expliciter. Sur ce point en effet, nos découvertes nous amènent à documenter un aspect spécifique de la situation : l'utilisation du corps et des gestes de l'ergothérapeute, en relation avec les préoccupations de construire, aider et guider sa manière d'agir dans la situation.

 Question transversale commune

Comment la question de la fonction d'adressage a-t-elle émergé dans le cours de la recherche ? 

Nous discuterons ici de la responsabilité déterminante de « l'adressage » dans le choix des orientations adoptées au cours de la recherche. Nous tenons pour principe que la singularité d'un travail de recherche tient en partie des différents mobiles qui habitent le chercheur. Aussi, en tant que double bénéficiaire des travaux, chercheur et praticien des situations professionnelles étudiées, nous décrirons les nombreuses disputes entre les aspirations professionnelles et scientifiques qui nous traversent et qui orientent notre travail.

Bibliographie

Boizumault, M. & Cogérino, G. (2012). La mise en scène corporelle de l'enseignant d'EPS : les communications non verbales au service de l'efficacité de l'enseignant. In Staps, n°98, 67-79.

Glaser, B. G. & Strauss, A. L. (1967). Discovery of Grounded Theory : Strategies for Qualitative Research. Chicago: Aldine.

Guérin, J. (2012). Activité collective et apprentissage, de l'ergonomie à l'écologie des situations de formation. Paris : l'Harmattan.

Leplat, J. (1997). Regards sur l'activité en situation de travail. Contribution à la psychologie ergonomique. Paris : PUF.

Leplat, J. (2013). Le geste dans l'activité en situation de travail, aperçu de quelques problèmes d'analyse. In Perspectives interdisciplinaires sur le travail et la santé, n°15-1, 2-19.

Maturana, H.R., & Varela, F. (1987). The tree of Knowledge. Boston & London : Shambala.

Ombredane, A. & Faverge, J.M. (1955). L'analyse du travail. Paris: PUF

Suchman, L. (1987). Plans and situated actions : the problem of human/machine communication. Cambridge : Cambridge University Press.

Theureau, J. (2004). Le cours d'action, méthode élémentaire. Toulouse : Octarès éditions.

Theureau, J. (2010). Les entretiens d'autoconfrontation et de remise en situation par les traces matérielles et le programme de recherche « cours d'action ». In Revue d'anthropologie des connaissances, vol 4, n°2, 287-322.

Strauss, A. L. (1992). La trame de la négociation, sociologie qualitative et interactionnisme. Paris : Harmattan


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