Les rapports de l'Inspection Générale (MEN 2013) sur la pratique des Professeurs des Ecoles (PE) en mathématiques mettent en évidence un certain nombre de constats :

- des domaines négligés (grandeurs et mesures),

- des activités insuffisamment mises en œuvre (résolution de problèmes).

Au-delà de ces constats, il semble pertinent d'affiner notre compréhension des pratiques enseignantes en caractérisant plus précisément le rapport au savoir mathématique des PE. En effet, le fait que des activités soient éludées dans les pratiques soulève la question du sens, de la valeur, que leur affectent les Professeurs des Ecoles. Nous nous interrogeons sur l'engagement des PE à enseigner les mathématiques, discipline que beaucoup n'ont pas choisie pour leurs études supérieures.

Pour cela, nous cherchons à caractériser leur rapport au savoir en mathématiques selon l'approche socio-anthropologique développée par Charlot (1999) qui distingue trois dimensions : la dimension épistémique (rapport à l'apprendre), la dimension identitaire (rapport à soi et aux autres), modulées par une dimension sociale. Centrée sur l'élève, cette approche a été adaptée au cas des enseignants (Maizières 2011).

Plus précisément, en lien avec la dimension épistémique, nous cherchons à déterminer quels enjeux de savoir les PE développent avec leurs élèves. En lien avec la dimension identitaire, quels sens prennent les mathématiques dans le quotidien des PE ? Enfin, une dernière question de recherche, relative à la dimension sociale, concerne le rôle des mathématiques dans notre société et la prise en compte du rapport au savoir mathématique des élèves. En effet, « dans nos sociétés, les mathématiques sont devenues un domaine fortement valorisé » (Fayol, 2013).

Notre méthodologie s'appuie sur des entretiens semi-directifs enregistrés puis analysés selon une grille élaborée pour étudier le rapport au savoir des PE à la Physique (Decroix & Kermen 2016), en lien avec les travaux de Venturini et Cappiello (2009). Notre échantillon est constitué de neuf PE expérimentés (au moins dix ans d'ancienneté), enseignants en cycle 3.

Nos analyses illustrent des liens entre le rapport au savoir en mathématiques et les pratiques des PE: une démarche pédagogique inégalement pilotée par la résolution de problèmes, un travail prioritaire dans le domaine numérique (dimension épistémique), les mathématiques comme outils dans la vie quotidienne (dimension identitaire) et le souci de rendre les mathématiques attractives (dimension sociale).

Une meilleure connaissance du rapport au savoir en mathématiques des PE permettrait de cibler les interventions les plus opportunes en formation initiale et continue alors que de nouveaux programmes accompagnés d'une réorganisation pédagogique des cycles vont être mis en œuvre dès la rentrée 2016.

Charlot, B. (1999). Le rapport au savoir. In J. Bourdon (dir), Education et formation : recherches et politiques éducatives (pp.17-34). Paris : CNRS éditions.

Decroix, A.-A. & Kermen, I. (2016). Rapport au savoir en physique-technologie des Professeurs des écoles. Neuvièmes rencontres scientifiques de l'ARDIST, Lens 30,31 /03 et 1/04 2016.

Fayol, M. (2013). L'acquisition du nombre. Paris : Presses universitaires de France (Que sais-je ? 3941).

Maizières F. (2011). Rapport au savoir musical des professeurs des écoles et pratiques d'enseignement : un transfert parfois complexe. Éducation et didactique, 5(2), 53-64.

Ministère de l'Éducation Nationale (2013). Bilan de la mise en œuvre des programmes issus de la réforme de l'école primaire de 2008. Rapport n° 2013-066.

Venturini, P. & Cappiello, P. (2009). Comparaison des rapports aux savoirs de la physique et des SVT. Revue française de pédagogie, 166(1), 48-58.