Les exigences nouvelles de professionnalisation et de rapprochement des milieux socio-économiques formulées aux universités françaises ont conduit à l'implantation de nouvelles valeurs particulièrement en phase avec les référents des formations en alternance. L'alternance entre des situations de formation et des situations de travail, sous réserve des conditions de sa mise en œuvre, constitue une offre de professionnalisation conçue à partir des situations de travail, des situations universitaires, voire des situations issues du monde domestique (Boudjaoui, 2010) de l'étudiant. Sa mise en place repose sur l'idée que l'on ne peut se préparer à une activité professionnelle qu'au contact de celle-ci (Billet, 2000) et sur la base d'une reconnaissance de l'importance de l'agir comme occasion d'apprendre et se professionnaliser. Globalement, ces dispositifs tendent à différencier le diplôme, certification a priori, de la compétence comme expérience en contexte et inscrivent l'étudiant dans une perspective permanente de développement de ses compétences, à son initiative et sous sa responsabilité.
Cette contribution s'inscrit dans l'orientation transversale « comprendre ». Nous présenterons et discuterons des résultats d'une recherche portant sur le rapport que les étudiants du Master Métiers de la formation établissent entre la formation en alternance et le développement de leurs compétences en ingénierie de formation. L'analyse d'entretiens semi-directifs avec 27 étudiants et l'exploitation des séances des suivis du mémoire souligne le rôle de l'alternance théorie/pratique, action /réflexion/action, action/réflexivité dans le développement des compétences et mettent en évidence un processus d'élaboration d'une « pensée pour l'action », reposant sur une combinaison de plusieurs facteurs, à savoir : l'échange, l'accompagnement, l'imprégnation par le modèle théorique ainsi que la nature de la mission et la responsabilité, assurant ensemble un véritable étayage entre savoir et activité. Nous examinerons le poids qu'exerce la reconnaissance de ses compétences par l'université et par le milieu professionnel sur la capacité de l'étudiant futur professionnel à se reconnaître lui-même comme « professionnel compétent » apte à réguler et à réinventer sa pratique par des « conversations » avec des situations épineuses inédites, sous forme d'enquêtes deweyennes (Chaubet, 2014), restaurant la puissance de l'expérience.
Alors que de modalité de formation destinée à un public en difficulté scolaire, l'alternance s'affirme actuellement en tant que dispositif de développement des compétences et voie de professionnalisation, pour clôturer notre exposé, nous opèrerons un retour réflexif sur l'évolution concomitante de nos travaux relatifs à l'objet « se former en alternance » ainsi que sur nos différentes prises de position selon nos contextes d'insertion en tant que chercheurs et praticiens.