4-7 juil. 2016 Mons (Belgique)

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Facteurs prédictifs de la motivation à apprendre à l'arrivée au secondaire
Jonathan Smith  1@  , Roch Chouinard  1@  
1 : Université de Montréal
90, avenue Vincent-d'Indy Montréal, Québec, Canada, H2V 2S9 -  Canada

La transition entre les écoles primaire et secondaire est réputée être l'une des plus éprouvantes à laquelle sont soumis les élèves québécois pendant leur cheminement. Alors qu'ils expérimentent des changements développementaux qui sont caractéristiques du début de l'adolescence, ils doivent simultanément apprivoiser un environnement d'apprentissage qui se transforme de manière considérable et composer avec le fait que leurs relations avec des personnes dans leur entourage peuvent momentanément être perturbées ou définitivement rompues. Ainsi, sous l'effet combiné de telles catégories de facteurs (individuels, contextuels et relationnels), les élèves sont susceptibles d'afficher une vulnérabilité, du moins, sur le plan motivationnel.

De nombreuses études menées dans les années 1980-90 et d'autres plus récentes indiquent effectivement que cette transition mène les élèves à douter de leurs capacités (Zanobini et Usai, 2012), à éprouver moins d'attrait pour les apprentissages et à dévaloriser ceux-ci (Chouinard et al., 2012) et à être de moins en moins tentés de vouloir acquérir des connaissances et de développer leurs compétences (Duchesne, Ratelle et Feng, 2014). Or, peu d'études semblables ont été reproduites au Québec ce qui fait en sorte qu'il est difficile d'établir si les élèves scolarisés dans cette province sont semblablement affectés par celle-ci. De même, bien qu'il soit reconnu qu'une multitude de facteurs peuvent déterminer l'orientation que prend la motivation pendant cette phase du cheminement, très peu de travaux ont généré des connaissances à cet effet et ont ainsi permis de mettre en évidence des conditions qui font en sorte que certains élèves sont à risque de voir leurs ressources motivationnelles s'altérer alors qu'à l'opposé, d'autres pourront voir celles-ci se stabiliser et peut-être même s'améliorer. Cette étude répond à ce besoin et devrait ainsi générer des connaissances utiles pour les praticiens qui sont soucieux de connaître les caractéristiques communes aux élèves qui sont plus et moins vulnérables pendant cette transition et qui souhaitent mettre en place des pratiques pour faciliter celle-ci.

Ainsi, un total de trois cent vingt-trois élèves issus de différentes régions du Québec ont été sondés alors qu'ils effectuaient la transition entre dix-sept écoles primaires et douze écoles secondaires. Plus spécifiquement, à la fin de leur 6e année au primaire (printemps 2012) et au début de leur 1re année au secondaire (automne 2012), ils ont répondu à un questionnaire qui a permis notamment de documenter leur motivation scolaire générale et de recueillir également des mesures liées à leurs milieux de vie et d'apprentissage et à leurs relations avec leur entourage. En ce qui a trait aux mesures de la motivation effectuées à ces deux temps, elles ont été soumises à un simple calcul qui a permis de déterminer si, de manière générale, leurs attentes de succès et valeurs générales demeuraient stables ou s'amélioraient ou au contraire, si elles se détérioraient pendant cette phase de leur cheminement. Puis, des analyses de régression logistique ont été réalisées afin d'identifier les caractéristiques individuelles, contextuelles et relationnelles qui permettent de prédire une orientation stable/haussière ou baissière des attentes de succès et valeurs en lien avec la scolarité.

Les résultats indiquent d'abord que les facteurs considérés ne permettent pas de prédire l'orientation que prennent le sentiment de compétence scolaire, l'intérêt pour les études et la valeur accordée à celles-ci. Or, ils permettent de constater que plus les élèves se retrouvaient dans une école secondaire défavorisée, plus ils étaient susceptibles de maintenir ou d'accroître leur usage de buts de performance, un résultat opposé à celui partagé par Chouinard, Bergeron, Vezeau et Janosz (2010), qui avait plutôt révélé que ces buts étaient davantage prisés dans les milieux plus nantis. Les relations plutôt harmonieuses avec les enseignants à la fin de la 6e année permettaient aussi de prédire des résultats stables/haussiers en lien avec de tels buts, un constat qui coïncide en quelque sorte avec celui de Murdock et Miller (2003), selon lequel les élèves qui perçoivent un soutien affectif chez leur enseignant peuvent valoriser davantage les apprentissages. En ce qui concerne, l'orientation vers la maîtrise, il semble curieusement que plus les élèves se sentaient isolés socialement à la fin de la 6e année, plus ils étaient susceptibles de rapporter des résultats stables/haussiers en lien avec celle-ci. Pourtant, il a été déjà été relevé que ces buts étaient davantage endossés par les élèves les mieux socialement intégrés (Wentzel et Asher, 1995). Par ailleurs, plus les élèves entretenaient des relations conflictuelles avec leurs enseignants à la fin de la 6e année, plus ils étaient susceptibles de rapporter des résultats stables/haussiers en ce qui concerne les buts d'évitement du travail. Ce résultat concorde avec une observation récente (Smith, 2012) selon laquelle des relations tendues peuvent être liées à des buts à valence négative. En somme, ces résultats suggèrent que ce sont les facteurs relationnels qui exercent la plus forte influence sur la motivation dans le cadre de cette transition et qu'ils ont plus spécifiquement un ascendant sur la valeur consacrée aux apprentissages. Les élèves les mieux intégrés socialement préserveraient effectivement de bonnes intentions qui sont susceptibles de soutenir leur engagement suite à cette transition.

Références bibliographiques

Chouinard, R., Bergeron, J., Bowen, F., Fallu, J.-S., Lefrançois, P. et Poirier, L. (2012). L'incidence du programme d'intervention 80, Ruelle de l'Avenir sur le vécu scolaire des élèves (Rapport n° 2009-PE-130813). Montréal, Québec : Université de Montréal.

Chouinard, R., Bergeron, J., Vezeau, C. et Janosz, M. (2010). Motivation et adaptation psychosociale des élèves du secondaire selon la localisation socioéconomique de leur école. Revue des sciences de l'éducation, 36(2), 321-342.

Duchesne, S., Ratelle, C. F. et Feng, B. (2014). Developmental trajectories of achievement goal orientations during the middle school transition: The contribution of emotional and behavioral dispositions. The Journal of Early Adolescence, 34(4), 486-517.

Murdock, T. B. et Miller, A. (2003). Teachers as sources of middle school students' motivational identity: Variable-centered and person-centered analytic approaches. The Elementary School Journal, 103(4), 383-399.

Smith, J. (2012). Motivation scolaire et adaptation psychosociale d'élèves du secondaire scolarisés en classe de prolongation de cycle (Mémoire de maîtrise, Université de Montréal). Repéré à https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/8892

Wentzel, K. R. et Asher, S. R. (1995). The academic lives of neglected, rejected, popular, and controversial children. Child Development, 66(3), 754-763.

Zanobini, M. et Usai, M. C. (2002). Domain-specific self-concept and achievement motivation in the transition from primary to low middle school. Educational Psychology, 22(2), 203-217.


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