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Dans le cadre de notre thèse en sciences de l'éducation, nous avons étudié la pensée éducative de N.F.S. Grundtvig (1783-1872), pasteur, philologue et pédagogue danois ayant inspiré le développement des Hautes écoles populaires (Folkehøjskoler).

Son ambition était de faire des séjours dans ces écoles destinées aux jeunes adultes, un tremplin qui les propulse pour leur vie entière.

L'influence de ces écoles fut particulièrement sensible concernant l'essor des coopératives agricoles, dont de nombreux anciens élèves prirent la responsabilité, au milieu du dix-neuvième siècle, participant au remarquable redressement économique de leur pays, à cette époque. Leur engagement est et reste également notable dans la vie sociale, culturelle, associative et même politique du Danemark.

De plus, de nombreux témoignages autobiographiques existent, témoignant de l'impact non seulement social mais aussi personnel d'un séjour dans une de ces écoles.

 Ce type d'expérience de la vie danoise – que nous avons également partagée – se trouve confrontée à la réalité que nous côtoyons de l'enseignement au sein de l'école française.

L'école y joue-t-elle ce rôle de tremplin pour la vie ?

Quelle est son efficacité pour la réussite professionnelle, mais également son influence sur le développement physique, intellectuel, personnel, social ?

Si la première question est très abordée d'un point de vue institutionnel, médiatique et universitaire, la seconde approche l'est beaucoup moins, si ce n'est en rapport avec les problèmes que l'école génère (échec, décrochage etc.). Et l'on s'interroge peu sur ce qui constitue l'expérience scolaire, sur son influence sur le long terme, et sur des êtres humains considérés dans leur globalité. Les textes officiels français énoncent pourtant des intentions ambitieuses concernant l'individu et le citoyen. Mais quels en sont les résultats, si ce n'est sur le monde de l'emploi ? Notre type de questionnement semble donc assez marginal dans le paysage éducatif, mais émerge cependant grâce à des travaux tels ceux menés par Lani-Bayle, à partir d'histoires de vie.

 D'où l'objectif général de notre recherche, celui de cerner l'impact que peut avoir, à moyen et long terme, l'expérience scolaire sur la vie individuelle et sociale.

 Notre projet consiste, dans un premier temps, en une étude de l'impact des Hautes écoles populaires danoises sur la vie des personnes à quelques années de cette expérience scolaire (entre trois et cinq ans), puis une vingtaine d'années plus tard.

Le seul témoignage de ce type, en anglais, ayant été publié en 1996 et concernant des adolescents, et la langue faisant obstacle à la compréhension des témoignages autobiographiques publiés en danois, nous envisageons de mener une recherche sous forme d'enquête (questionnaires), en anglais, ce qui demande une collaboration avec le bureau danois des Hautes écoles populaires, puis avec certaines d'entre elles (les contacts sont déjà établis).

Le questionnement concerne, pour la personne, l'orientation professionnelle, l'engagement politique, social, associatif, mais surtout la capacité à la vie sociale (échanges, dialogues, interrelation), et l'impact sur la vie en général (trouver sa place dans le monde, la société, ou savoir s'en donner les moyens, confiance en soi, espoir, passage à l'action, initiative). Notre posture est donc d'ordre psycho-social. Puis, dans un second temps, l'accent est mis sur les raisons de ces conséquences sur la vie personnelle et sociale : s'agit-il de la personnalité des enseignants, du contenu les cours, de la vie en collectivité, des possibilités de dialogue...?

L'étude de ces questionnaires devrait permettre de déterminer s'il existe un facteur essentiel ou un ensemble de facteurs corrélés aux impacts - positifs ou négatifs – de ces séjours. En fonction du nombre et de la qualité des réponses obtenues, apparaîtra ou non la nécessité d'un complément d'étude par entretien ou histoire de vie, ce qui ouvrirait éventuellement la possibilité d'un parallèle avec les travaux de Lani-Bayle en France et au Brésil.

 Enfin, il conviendra d'étudier dans quelle mesure et de quelle manière les résultats acquis grâce à ces dispositifs pourraient être confrontés soit aux données constitutives du système éducatif français (forme scolaire, textes officiels, mode d'évaluation), soit à des recherches relatives à l'expérience scolaire, telles celles de Charlot, ou Bautier et Rochex. 

Références bibliographiques :

Thodberg, C., Pontoppidan Thyssen, A. (1983) N.F.S Grundtvig, Tradition et Renouveau. La conception de l'homme et du peuple, de l'éducation et de l'Église chez Grundtvig, à la lumière des préoccupations du monde d'aujourd'hui. Copenhague, Det danske Selskab

M. Borish, St., (1996) Danish social movements in a time of global destabilization. Vejle, Denmark, Kroghs Forlag A/S

Lani-Bayle, M. (dir.) (2000) Raconter l'école au cours du siècle. Paris, L'Harmattan.

Bier, B., Vulbeau, A. (2010) Dossier Le « moment école » : la vie en milieu scolaire comme expérience. Revue Agora, débats/jeunesse, n°55, Presses de Sciences Po (P.F.N.S.P.)