Cadre de la recherche : La catégorisation des objets du monde réel constitue une conduite adaptative fondamentale qui permet à l'intelligence de réduire la complexité de l'environnement physique et social en l'organisant (Carbonnel, 1982 ; De Vries, 2006 ; Rosch, 1973 ; 1976 ; 1978). Dans l'éducation technologique, il semble que ce soit l'éducation informelle dispensée par les médias ou l'entourage familial des enfants qui pourvoit implicitement à la mise en ordre de l'environnement technologique que les élèves sont conduits à opérer. Il n'est donc pas étonnant de constater que la catégorisation des objets techniques semble faire l'objet de difficultés plus nombreuses que celle des objets naturels. Les constats que l'on peut dresser à ce sujet restent toutefois très limités car, dans la plupart des études sur la catégorisation de ces deux types d'objets, les données brutes sont rarement accessibles, les résultats étant présentés, dans la plupart des cas, d'une manière synthétique qui ne permet pas d'identifier les catégorisations opérées pour chaque entité présente dans le matériel utilisé. La recherche conduite par Cannard, Bonthoux, Blaye, Scheuner, Schreiber & Rinquart (2006) fait néanmoins exception à cet égard dans la mesure où elle visait à constituer une base de données pour 274 images d'objets que des enfants de 4 à 8 ans ont eu à identifier et catégoriser. Cette étude montre que les enfants savent effectuer des catégories taxonomiques à propos des objets techniques dans un certain nombre de domaines tels que les vêtements, les ustensiles de cuisine, les jouets, les véhicules, les meubles, les aliments, les outils ou les instruments de musique. Mais, dans le détail, les résultats montrent aussi qu'un nombre non négligeable d'objets techniques ne donnent lieu qu'à des catégorisations de nature thématique. Les objets concernés sont alors catégorisés en fonction du lieu dans lequel ils sont habituellement stockés et utilisés. Cependant, le manque d'étude à ce sujet traduit son faible intérêt d'un point de vue théorique ou empirique en éducation. La littérature consacrée à la « chose technique » que ce soit de la part des philosophes (Haudricourt, 1964 ; Hottois, 1994 ; Ihde, 1990 ; Perrin, 1991), des sociologues (Cazenobe, 1987 ; Latour, 1992 ; Mauss, 1936 ; Séris, 1964 ; Simondon, 1958 ; 1968), des historiens (Daumas, 1962) , des ethnologues ou anthropologues (Leroi-Gourhan, 1964 ; Warnier, 1999) et, par opposition et en marge de quelques contributions en éducation (Deforge, 1993). En France notamment, pendant de très nombreuses années, il n'a existé que deux équipes de recherche en éducation technologique clairement identifiées (celles respectivement dirigées par JL Martinand et J. Ginestié).
Méthodologie et les résultats : La mise au point définitive d'un questionnaire susceptible de faire l'objet d'une passation en ligne auprès d'un large public d'élèves a été précédée par la mise à l'épreuve préliminaire d'un questionnaire administré sous la forme « papier-crayon » auprès d'un échantillon restreint de sujets (57 élèves de 5ème). Les résultats globaux de cette étude exploratoire, menée à petite échelle, se sont néanmoins révelés suffisamment intéressants au plan scientifique pour donner lieu à la publication d'un premier article (Authors). La réalisation d'une enquête à plus grande échelle constitue donc aujourd'hui un passage obligé en vue de la généralisation, de la contextualisation, et de la spécification ou non de ces premières données. Cet objectif de généralisation, en lien avec la taille de l'échantillon impliqué dans l'enquête, nous a conduits à vouloir privilégier une forme de questionnaire administrable en ligne sous forme numérique à partir du logiciel Sphinx. Sous sa forme actuelle, consultable en ligne (http://sphinx.espe.univ-amu.fr/adef/EnqueteObT_2015-16/questionnaire.htm) le questionnaire se compose de trois parties portant sur 1) la caractérisation des objets techniques ; 2) la capacité à établir des liens entre les objets ; 3) Le rapport personnel aux objets techniques et l'intérêt envers les sciences et la technologie. S'y ajoutent pour les élèves plus âgés (lycéens) quelques items supplémentaires (engrenages, proportion et échelle, ordre des grandeurs, cycle de l'eau, énergies renouvelables). L'échantillon auquel nous souhaitons recourir est constitué par des classes prises dans une dizaine de réseaux d'établissements (écoles, collèges et lycées) contrastés (urbains, ruraux, semi-urbains, réseaux d'éducation prioritaires). La diversité des établissements concernés et leur homogénéité au sein d'un même réseau.