4-7 juil. 2016 Mons (Belgique)

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Un passé national belge ? Quels schémas narratifs partagés par les jeunes au terme de leurs études dans le secondaire ?
Dzifanu Tay  1, *@  , Mathieu Bouhon  1, *@  
1 : Université Catholique de Louvain  (UCL)  -  Site web
Place de l'Université 1 - 1348 Louvain-La-Neuve -  Belgique
* : Auteur correspondant

De la fin de la deuxième guerre mondiale jusqu'à la fin de l'État unitaire, les instances politiques belges ont évité de promouvoir une identité nationale aussi bien dans les politiques de la mémoire que dans l'enseignement de l'histoire (Rosoux & van Ypersele, 2012). Mieux valait ne pas raviver inutilement les blessures idéologiques et communautaires nées de l'occupation, de la collaboration avec le nazisme et de la répression qui s'en était suivie. Avec la mise en place d'un État fédéral dans les années 1970-1980, composé de deux grandes communautés culturelles disposant chacune de leur propre système éducatif, on aurait pu s'attendre, dans l'enseignement de l'histoire, au retour d'un récit « national » promouvant l'identité d'une région ou d'une communauté culturelle, voire celle d'une entité plus large faite de la rencontre et de la cohabitation de deux peuples et de deux langues. Or l'analyse des programmes d'enseignement montre qu'aucun récit « national » à propos d'une des grandes communautés, voir des deux conjointes, n'a pris le pas. Le processus de dissolution d'une histoire de Belgique, entamé avant la fédéralisation, s'est prolongé et n'a pas été remplacé par une histoire de la Wallonie ou de la Flandre. Au contraire, l'enseignement de l'histoire au sein des deux grandes communautés a opté pour la promotion d'une identité citoyenne relativement apatride ou du moins inscrite dans une histoire « occidentale » large au sein de laquelle ce qui avait trait au passé des Belges et de leurs communautés respectives a été relégué sous l'appellation d'histoire de « nos régions ».

De nombreuses recherches ont porté sur les récits nationaux portés par les jeunes (Grever & Ribbens, 2007), notamment celle de Wertsch (2004) auprès de jeunes russes ou celle de Penuel (Penuel & Wertsch, 2000) auprès de jeunes américains. Wertsch montre que les récits historiques nationaux fonctionnent comme des outils culturels permettant de donner forme aux représentations du passé. Celles-ci se construiraient à partir de modèles ou de schémas narratifs culturellement situés et socialement partagés. Ainsi, le récit de jeunes russes partagerait-il un point, celui d'une nation capable de résister aux forces étrangères au prix de grandes souffrances s'il le faut, tout comme celui des jeunes américains aurait pour dénominateur commun la nation en marche vers la liberté. En ce qui concerne la Belgique, Van Nieuwenhuyse dans une étude récente (Van Havere, Van Nieuwenhuyse, Wils, Depaepe & Verschaffel, 2015), fait état de différents modèles narratifs en circulation dans les médias et les communications sociales : la nation en germe depuis le Moyen-Âge, la nation libérale et progressiste, le melting-pot, l'Absurbdistan, le Cœur-de-l'Europe, les lignes de fractures... Mais aucun de ces récits en circulation n'est officiellement endossé par les instances politiques du pays, notamment dans l'enseignement de l'histoire. Dans ce contexte d'évaporation progressive d'un enseignement de l'histoire de Belgique, voir de son absence, nous nous sommes demandé de quels récits et de quels modèles ou schémas narratifs les élèves sortant de l'enseignement secondaire étaient porteurs et, le cas échéant, quels liens pouvait-on établir avec leur identité. La communication fera état des résultats obtenus auprès de jeunes étudiants interrogés à l'entame de leur première année de baccalauréat en histoire l'Université catholique de Louvain. Des comparaisons seront établies avec les résultats obtenus auprès de jeunes étudiants néerlandophones.

Mots-clés : enseignement de l'histoire ; histoire nationale ; identité 

références bibliographiques

Grever M. & Ribbens, K. (2007). Nationale identiteit en meervoudig verleden. Amsterdam: University Press.

Penuel, W.R. & Wertsch, J.V. (2000). Historical Representation as Mediated Action: Offical History as a Tool. In: J.F. Voss & M. Carretero. Learning and Reasoning in History. Series: International Review of History Education vol. 2, London, 23-37.

Rosoux, V. & van Ypersele, L. (2012). The Belgian national past: Between commemoration and silence. Memory Studies, 5(1), 45–57.

Wertsch, J.V. (2004). Specific Narratives and Schematic Narrative Templates. In: P. Seixas (ed.). Theorizing Historical Consciousness. Toronto-Buffalo-London: University of Toronto Press, 49-62.

Van Havere, T., Van Nieuwenhuyse, K., Wils, K., Depaepe, F. & Verschaffel, L. (2015). Het nationale verleden verhaald. Dertien narratieve sjablonen uit de Belgische geschiedenis. Hermes: Tijdschrift van de Vlaamse Vereniging voor Leraren Geschiedenis, 19(57), sous presse.


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