Outils de recherche > Chercher une contribution par auteur > Stenger Zoé

Cette communication est l'œuvre d'une étudiante de master recherche impliquée dans cette équipe, attachée à répondre un peu largement à deux questions de ce symposium : « que font les étudiants lorsqu'ils étudient ? Que fait l'institution à ceux qui enseignent et étudient ? ». Ce questionnement prendra la forme d'une auto-analyse à partir de l'expérience réflexive contextualisée, étayée par un journal de terrain, des observations en cours de master, des entretiens comparatifs avec des étudiants, et un recueil de données lors des séances de recherche coopérative sur la pédagogie universitaire au sein du présent projet. Le cadre théorique est celui de la clinique, d'inspiration psychosociologique (Giust-Desprairies, 2004), instrumentée selon une épistémologie du témoignage (Ardoino, 2005).

Il s'agira d'éclairer le problème posé par ce symposium du point de vue particulier des étudiants eux-mêmes, non pas à propos des étudiants mais par des étudiants (ou plus exactement une étudiante).

Le principal élément d'interrogation constitue ce qu'on pourrait nommer « la petite histoire d'un déchirement » : entre fascination, enrichissement, questionnement, émancipation d'un côté, et souffrance, pleurs, anxiété et exaspération de l'autre. L'expérience vive d'un conflit interne provoqué par la pratique universitaire, tant du point de vue de la pédagogie que des objectifs parfois opaques, conduit à la fois à un désir ardent de poursuivre et à une envie forte de fuir. Ce sont les conditions de cette contradiction que nous nous efforcerons d'élucider.

Nous formulerons un premier constat, selon lequel un grand nombre d'étudiants ne savent pas très bien pourquoi ils étudient. Plutôt que d'y reconnaître un obstacle, nous ferons l'hypothèse qu'il y a là l'occasion d'expérimentations nombreuses, porteuses de sens et de créativité possible : comment apprendre à « jouer le jeu » du système universitaire, avec ses codes, ses normes, sa discipline, de sorte à produire quelque chose de bon pour soi ?

Ceci nous conduira à un second constat, celui du devenir trouble de l'expérience : plus nous parvenions à satisfaire les attentes universitaires, moins nous éprouvions notre capacité de créativité, de critique, d'enthousiasme. Et plus particulièrement, empruntant la voie de la recherche, nous éloignant des perspectives immédiates de professionnalisation caractéristiques d'autres formations, nous éprouvions la terrible anxiété d'un changement de mode de vie et de pensée, et avec lui l'apparition d'une nouvelle vulnérabilité à laquelle le corps professoral semble indifférent, et qui ne fait l'objet d'aucun accompagnement. Ceci nous conduira à interroger le problème de la rencontre professeurs-étudiants tout au long d'un parcours d'étude et, au-delà de l'évidente transmission magistrale des connaissances, de ses impensés.

Regard réflexif sur la question de recherche : nous nous demanderons : quels processus et facteurs nous ont conduites à nous poser ces questions du déchirement et des conditions de créativité dans l'étude ? Pour qui ces questions sont-elles pertinentes, étudiants ou enseignants ? A quels enjeux, au sein de l'expérience universitaire, sont-elles liées ?

Ardoino, J. (2005). Vérité, preuves et témoignage, fragments. [en ligne] consulté le 8 janvier 2016. http://www.barbier-rd.nom.fr/temoignaArdoino2.pdf

Ardoino, J. (2005). Motivations. [en ligne] consulté le 8 janvier 2016. http://jacques.ardoino.perso.sfr.fr/pdf/motivation.pdf

Gaulejac de V., Giust-Desprairies F., Massa A. (2013). La recherche clinique en sciences sociales. Toulouse : Erès.

Giust-Desprairies F. (2004). Le désir de penser. Construction d'un savoir clinique. Paris : Téraèdre.

De Ketele, J.-M. (2010). La pédagogie universitaire : un courant en plein développement. Revue française de pédagogie. 172, 5-13.

Loiola, F. A. & Romainville, M. (2008). La recherche sur la pédagogie de l'enseignement supérieur. Où en sommes-nous ? Revue des sciences de l'éducation. 34(3), 529-535.

Rancière, J. (1987). Le maître ignorant. Paris : Fayard.